Vita est in motu

Pas de doute, comme les étapes majeures de notre histoire millénaire, les grands déplacements actuels de population à travers notre planète nous dérangent : ils viennent perturber nos habitudes et nos conditions de vie, le rythme bien réglé de nos existences individuelles comme de nos administrations et de nos organisations ; surtout, les images que nous montrent les chaînes de télévision et ce que nous entendons et lisons dans les médias bouleversent profondément nos esprits et nos façons de penser, divisent nos sociétés en faveur ou en rejet de migrants qui nous arrivent de partout. Ils ferment ou ouvrent nos cœurs… 

Notre mémoire, trop immédiate et myope, oublie que l’histoire de l’humanité est migration et que tous les pays du monde se sont construits sur ces mouvements incessants de population. La sagesse de tous les continents nous l’enseigne : vita est in motu, la vie est dans le mouvement ; inversement, la mort marque l’arrêt du mouvement, tel que nous le connaissons. En ce sens, tant que nous sommes vivants sur cette planète, nous sommes tous migrants, que nous soyons sédentaires ou en exil forcé.

Saurons-nous accueillir avec toute l’hospitalité qu’ils méritent ceux qui nous arrivent de plus ou moins loin et pour diverses raisons ? C’est une question de vie ou de mort pour notre civilisation et notre vivre ensemble planétaire : le repli sur soi de l’Europe et de chacun des pays membres serait à coup sûr suicidaire pour le grand projet européen mais, par contagion et imitation, il pourrait bien atteindre les pays du reste du monde qui, par réciprocité, refermeraient leurs frontières et multiplieraient les murs.

Pour notre part, à Josefa, et avec beaucoup d’autres, nous sommes convaincus que, loin de nous menacer dans notre économie comme dans notre organisation sociale, l’arrivée et l’accueil de migrants, surtout ceux qui ont été obligés de tout quitter pour les raisons que nous connaissons, fécondent la vie de nos sociétés vieillissantes dans toutes leurs dimensions. Ces nouveaux venus nous apportent leurs compétences et leur expérience, en particulier, celle, incomparable, de la migration forcée, toute la richesse de leur culture et de leur façon de penser et de vivre. Ils stimulent la nécessaire mutation de notre civilisation occidentale malade de sa richesse, asservie à la puissance financière, et à bout d’inspiration. Ils accélèrent notre propre migration personnelle et collective vers de nouveaux vivre ensemble.

Jean-Louis