Tous malades… tous migrants

« Tout bien portant est un malade qui s’ignore » : cette saillie humoristique de Jules Romains dans « Knock ou le triomphe de la médecine » pourrait s’étendre et se généraliser à d’autres domaines que la santé, dans la société, le monde, dans nos vies personnelles...

En ces temps incertains aux situations complexes qui induisent, non sans raison, des jugements parfois pessimistes sur l’évolution de notre humanité, comme souvent, des coupables sont recherchés : chacun, de son côté ou en collectif, épingle volontiers l’impuissance, voire la complicité de ceux qui détiennent le pouvoir (politique, financier, juridique, militaire, religieux…) ; on accuse les systèmes ou les modèles (politiques, économiques, techniques, médiatiques, religieux) ; on pointe du doigt la défaillance généralisée des sociétés dites civiles, l’éloignement des cadres de références, des valeurs dites traditionnelles, l’avènement traumatique des technologies post-modernes… Autant de facteurs qui minent et contaminent le monde et le rendent malade.

Mais, nous-mêmes, individuellement, personnellement, dans notre vie familiale ou professionnelle, voire dans les institutions dont nous sommes adhérents, dans les associations où nous militons, serions-nous les seuls indemnes de l’épidémie et en bonne santé, échappant à la contagion générale ?

Mieux vaut l’avouer sans faux fuyant, nous sommes tous malades, comme le disait Knock en plaisantant, et nous avons tous grand besoin de nous soigner. Sans doute, le meilleur chemin de la guérison est d’abord ce constat d’être contaminé par l’épidémie universelle qui n’épargne personne et qui attend ensuite un juste diagnostic.

Semblablement pour la majeure partie des maux dont sont affectées et souffrent nos sociétés, nous pourrions nous interroger et indexer notre degré de participation à la contamination générale.

Nous découvririons alors que nous ne nous portons pas si bien que nous le croyions et qu’effectivement, comme le disait Knock, nous sommes tous des malades qui s’ignorent.

De fait, au-delà de nos peurs, franchissant nos portes, n’en va-t-il pas de même en matière de « migration » ?

Jean-Louis