Migrant comme je

En matière d’approches sur la question migratoire, approches certes plurielles, se dégage majoritairement une lecture proche de l’indifférenciation... « les migrants, les réfugiés, les déplacés »… 

Pour Josefa, l’enjeu est de re-mettre l’accent sur l’unique de chaque personne humaine en sa propre migration.

Dès lors, il s’agit de chercher à se dégager d’un engagement social radicalement orienté vers l’autre, dit « migrant », dans une geste, aussi « belle » soit-elle.

L’autre migrant en devient/deviendra unique comme je le suis potentiellement pour elle ou lui.

Nos migrations particulières ou singulières nous révèlent d’abord à nous-mêmes... Si le discours ambiant (« migrants », « réfugiés ») abandonne son ton magistral, il deviendra alors possible de s’éloigner sans honte de ses frontières catégorielles, « les migrants », « les réfugiés », qui mettent paradoxalement à distance (n’en déplaise à la plupart d’entre nous).

« Migrant comme je » apparait, sous cet angle, comme source de fécondité bien éloignée « des migrants », amalgame indifférencié, sans nom, sans visage, comme trop souvent encore les médias, les politiques, les « analystes-experts » de tous bords, nous y conduisent « aveuglément ».

« Migrant comme je » révélation du je comme personne et non pas comme « objet » d'un autre, aussi empathique, compassionnel soit le regard ou l’acte posé.

Question : au cœur de quelle(s) intelligence(s) se construit une éthique de la responsabilité à l’égard d’autrui si on en fait un objet (et parfois un déchet) ? Que garderont nos futures intelligences artificielles de cette manière de penser le monde divisé en deux masses : d’un côté, « les migrants, les réfugiés » ; de l’autre, une autre catégorie, « indéfinie », toutes deux se faisant face ?

« Migrant comme je » : fondement de la création d'un nous. Migration comme Bien commun fondamental. Seuil unique d'ouverture à une hospitalité de nos uniques.

Besoin, nécessité, loi d'humanité : l'engagement (social, sociétal, médiatique, politique, philosophique…) ne peut se faire sur « le dos » d'autrui. Il devient donc urgent de se dégager d’une voie/voix qui fait des autres « des migrants », perçus « obligatoirement » comme masse, groupe, affecté par une "vulnérabilité" a priori, d’ailleurs bien difficile de préciser, semble-t-il, lorsque la question est de respecter la singularité, la dignité, de chacune, de chacune.

« Migrant comme je » devient en même temps « je comme migrant ». Je, en nous, avec nous, se désengage en ne s’engageant pas au nom des autres mais, en assumant sa propre condition fondamentale migrante, sans exclure des possibles gestes, paroles, actes ; condition donnée, ouverte à tous, et surtout inscrite en chacun, chacune. Affaire de plasticité humaine, voire du vivant, entre temps, entre attentions, entre espace(s) de vie(s).

« Migrant comme je ». Un accord en soi agissant. Au paradoxe d'un désengagement qui engage. Ensemble de je(s) en en-jeu(x) d'humanité(s).